Alors que nous nous interrogeons de plus en plus souvent sur la provenance et la composition des aliments que nous consommons ou des cosmétiques que nous utilisons, rares sont nos interrogations sur le dentifrice, qu'on nous conseille pourtant d'utiliser trois fois par jour sans faute! Son utilisation, dans l'idéal après chaque repas, permet d'enlever plus facilement la plaque dentaire, évite la mauvaise haleine, et prévient les maladies des dents et des gencives. Mais que contiennent réellement nos tubes? Tour d'horizon d'un indispensable de notre salle de bain.
- La première référence à une forme de dentifrice se trouve dans un manuscrit égyptien datant du IVe siècle av. J.-C., qui mentionne une mixture à base de sel, de poivre, de feuilles de menthe et de fleurs d'iris. Les Romains utilisaient des formules à base d'urine humaine et les Egyptiens de l'Antiquité employaient un mélange de cendres et d'argile.
- L'utilisation de poudres faites maison, le plus fréquemment à partir de craie, de poudre de brique ou encore de sel, ne s'est généralisée qu'à partir du XIXe siècle. La brosse à dents, qui fut d'abord utilisée simplement avec de l'eau, connut les premiers dentifrices commercialisés au XIXe siècle. C'est en 1896, à New York, que Colgate & Company a produit le premier tube de dentifrice souple tel qu'on le connaît aujourd'hui.
- Au début du XXe siècle, on conseillait d'utiliser une pâte à base d'eau oxygénée et de bicarbonate de soude. Ce mélange est encore préconisé actuellement pour prévenir les maladies parodontales.
- On commença à ajouter du fluorure dans les dentifrices dans les années 50. Le fluor est un agent important dans la protection contre les caries et son efficacité a été démontrée par de nombreuses études dans le monde entier. Le fluor par application topique (en brossage) exerce en effet une action minéralisante sur la dent qui contribue à la durcir et à la protéger; il exerce aussi un effet inhibiteur du développement des bactéries qui provoquent les caries. Les apports alimentaires de fluor ne sont utiles que pour les dents en formation (voir les recommandations de la Haute Autorité de Santé). Les autres apports sont alimentaires et proviennent du sel de cuisine, que l'on choisira de préférence iodé et fluoré.
- Mais un apport trop important de fluor expose à des risques d'intoxication aiguë ou chronique: chez les enfants, en particulier de moins de 6 ans, le fluor est toxique à partir d'une dose ingérée de 5 mg/kg. Tous les organes sont affectés, avec des troubles digestifs (nausées, vomissement, diarrhées, douleurs abdominales), respiratoires, cardiaques. Une dose de 15 mg/kg de fluor ingérée peut être mortelle. Les premières manifestations cliniques d'une fluorose sont des lésions irréversibles de l'émail dentaire: fines lignes blanchâtres, horizontales et parallèles dans les formes les plus modérées. Dans les formes plus sévères, la fluorose est à l'origine de taches opaques et blanchâtres jusqu'à jaunâtres ou brunâtres, avec des zones d'érosion et de perte de substance. Ce risque d'intoxication chronique est plus important lors d'un apport de fluor par des sources diverses (eau de boisson, médicament, sel de cuisine enrichi, etc.).
- Il faut savoir qu'un jeune enfant avale une partie du dentifrice qu'il met en bouche: 30% chez un moins de 6 ans et 65% pour un moins de 3 ans. Avant l'âge de 3 ans, l'Association dentaire française déconseille l'usage d'un dentifrice au fluor compte tenu du risque d'ingestion. De 3 à 6 ans, si l'enfant n'a pas acquis le réflexe de recracher, il faut conseiller aux parents un dentifrice à teneur réduite en fluor (teneur en fluor inférieure à 500 ppm). Après 6 ans, le dentifrice familial (teneur en fluor supérieure à 1000 ppm) conviendra à tous.
- Seules les pharmacies peuvent proposer à la vente des dentifrices avec une concentration de fluor supérieure à 0,15% soit 1500 ppm. Les produits ont alors le statut de médicament. Les autres avec moins de 1500 ppm, en vente dans les grandes surfaces ou en pharmacie, ont le statut de "produit cosmétique" et sont conformes au règlement européen sur les cosmétiques.
- Certaines marques emploient du monofluorophosphate de sodium, du fluorure d'étain, du fluorure d'amine. En France, pratiquement tous les dentifrices vendus dans le commerce contiennent un de ces agents actifs, dans une proportion de 1000-1100 ppm. Le fait que ce taux soit relativement constant conduit à penser que les dentifrices bon marché sont tout aussi efficaces que les dentifrices plus onéreux. Dans une étude menée en 1998 sur 38 dentifrices, le magazine américain Consumer Reports (www.consumersearch.com/toothpaste/review) jugea l'efficacité de 30 d'entre eux comme étant excellente.
- Selon l'OHDQ, un dentifrice conventionnel est composé de:
- Agents de nettoyage et de polissage: 20 à 40% (ex: silice, etc.)
- Humectants: 20 à 40% (ex: glycérol, etc.)
- Eau: 20 à 40%
- Agents de conservation, édulcorant et colorant: 2 à 3%
- Agents liants: 1 à 2% (ex: gomme naturelle, etc.)
- Détergent (agent moussant): 1 à 2% (ex: laurysulfate de sodium ou un autre type de sulfate). Le laurysulphate de sodium, qui peut être irritant, est également présent dans d'autres cosmétiques tels que le shampooing, et agit principalement comme agent moussant.
- Arôme: 1 à 1,5% (ex: menthe, cannelle, etc.)
- Agent thérapeutique: 1 à 2%
- Des ingrédients tels que du bicarbonate de soude, des enzymes des vitamines, des extraits végétaux, du calcium, des produits de bain de bouche, ou encore de l'eau oxygénée sont souvent ajoutés au mélange de base et mis en valeur par les marques pour leurs effets bénéfiques.
- Le calcium utilisé dans le dentifrice est produit à partir d'os d'animaux ou de chaux. Pour les végétariens et les végétaliens, des dentifrices d'origine indienne dépourvus de dérivés animaux on été introduits dans le commerce.
- En 2007, des dentifrices fabriqués en Chine et contenant du diéthylène glycol (DEG), une substance chimique de la famille des éthers de glycol utilisée comme solvant ou épaississant, et interdite dans les cosmétiques car étant toxique lorsqu'elle est ingérée, ont été retirés du marché. Un autre ingrédient toxique se retrouve parfois dans certains de nos dentifrices: le triclosan. Cet antibactérien, néfaste pour l'environnement, pose problème puisque les stations d'épuration ne parviennent pas à l'éliminer. Sa présence est susceptible de favoriser la résistance de souches bactériennes.