Il ne fait pas toujours bon être leader mondial d'un marché et marque "emblématique" d'un produit. C'est ce que doivent se dire, ce matin, les dirigeants de Nutella (groupe Ferrero). La commission des affaires sociales du Sénat a en effet adopté hier, mercredi 7 novembre, un amendement au projet de budget de la Sécurité Sociale pour 2013, baptisé "amendement Nutella", visant à tripler la taxe sur l'huile de palme, qui entre notamment dans la composition de ce produit alimentaire culte... mais aussi de nombreux aliments industriels (pâtisseries, fritures, pain de mie, margarine). Au total, les Français en consomment, souvent à leur insu, près de 130 000 tonnes par an, soit quand même 2 kilos par habitant. Selon le sénateur Yves Daudigny, l'objectif est d'envoyer un signal "non à destination des consommateurs, mais à destination des industries agroalimentaires, pour qu'elles substituent à ces huiles de nouvelles compositions plus respectueuses de la santé humaine". Car l'huile de palme (comme les autres huiles visées par le projet - palmiste ou coprah) est une graisse saturée qui contribuent au développement de l'obésité et favorisent les maladies cardio-vasculaires. Or "elles sont utilisées de manière excessive par la restauration collective et dans l'industrie agroalimentaire", selon Yves Daudigny, ajoutant qu'elles "sont notamment incorporées dans les produits de biscuiterie et dans l'alimentation salée ou sucrée à destination des enfants". A cet impact sanitaire s'ajoute un impact environnemental, puisque dans les régions où il est cultivé, comme l'Indonésie, la Malaisie ou le Brésil, le palmier à huile contribue aussi à la destruction des forêts tropicales (voir notre fiche-produit sur l'huile de palme). Avec une taxe à 300 euros la tonne d'huile de palme, de palmiste ou de coprah, la mesure rapporterait à l'Etat 40 millions d'euros par an, selon l'exposé des motifs de l'amendement. Et sur un kilo de Nutella, elle engendrerait en théorie une augmentation de 6 centimes environ.
Pour ne rien arranger aux affaires de Nutella, dont les oreilles doivent décidément siffler ces jours-ci, Casino (anticipant très certainement l'adoption de l'amendement) a lancé il y a deux jours sa nouvelle pâte à tartiner, "Je suis noisette", un nouveau produit qui vient enrichir une gamme de 340 produits garantis sans huile de palme (le groupe est engagé depuis 2010 dans un processus de suppression progressif de cet additif alimentaire dans ses marques propres). Et pour ce lancement, Casino a osé la publicité comparative avec le numéro un mondial Ferrero et son produit-phare Nutella. Notons quand même que, si Casino revendique la "première pâte à tartiner sans huile de palme", d'autres produits similaires existent déjà dans les circuits bio, où la marque Jean Hervé, par exemple, propose une pâte Chocolade Bio sans huile de palme (avec une teneur en noisettes supérieure au marché - 31% et de l'huile de colza française).