La presse s'en fait largement l'écho depuis dix jours : Unilever a annoncé la prochaine introduction en Europe, du fait de l'appauvrissement probable de la population sous l'effet de la crise (en France, le taux de pauvreté atteint 14,1% selon l'INSEE, son plus haut niveau depuis 1997), des approches de type "produits pour les pauvres" ou "bas de la pyramide" développées à l'origine pour les pays du sud (Inde, Bangladesh, etc.). De quoi s'agit il au juste ? Principalement de la vente des produits à l'unité ou dans des volumes moins importants (produits de première nécessité, d'hygiène ou détergents, par exemple), de sorte que la somme à débourser soit plus modeste et que l'acte d'achat s'en trouve facilité. "La pauvreté revient en Europe", a dit Jan Zijderveld, le patron d'Unilever, au quotidien allemand Financial Times Deutschland, ajoutant : "Si un Espagnol ne dépense plus en moyenne que 17 euros quand il fait les courses, je ne vais pas lui proposer un paquet de lessive qui coûte la moitié de son budget". Le groupe a d'ailleurs commencé à vendre en Espagne de petits paquets de lessive ne permettant de faire que cinq machines. Si Michel-Edouard Leclerc a déclaré partager le point de vue d'Unilever, le patron de L'Oréal Jean-Paul Agon s'est en revanche prononcé contre ce qu'il appelle "une logique de paupérisation et de banalisation des produits", prônant plutôt le modèle fondé sur l'innovation et la valeur ajoutée des fabricants de smartphones.
Sur le fond, rien de choquant - car il n'est pas nouveau que des innovations sociales développées pour les pays du Sud soient importées avec succès en France, comme ce fut le cas par exemple pour le micro-crédit (voir par exemple le succès de l'ADIE). Mais une chose est sûre : le système de vente à l'unité n'est pas toujours plus avantageux, au fond, pour les ménages et l'environnement. Car même sil peut paraître plus attractif aux ménages modestes, le produit à l'unité est toujours plus cher que son équivalent vendu au litre ou au kilogramme. Et les emballages individuels ont plus d'impact écologique que les grands contenants... Autant dire que ni la crise économique ni la crise écologique ne risquent d'être résolue par cette nouvelle pratique, comme l'a justement souligné l'association de consommateurs CLCV.