Après l’engagement de l’agence de relations publiques Edelman qui a annoncé en septembre dernier son intention de ne plus travailler pour des entreprises polluantes niant la réalité du changement climatique, c’est l’enseigne américaine CVS Health (10e entreprise américaine selon Fortune en 2014) qui a fait parler d’elle ces derniers mois après avoir annoncé en septembre 2014 qu’elle cessait de vendre du tabac dans ses "drugstores" avec en complément le lancement d'un programme pour aider ses clients à arrêter de fumer. Il est vrai que la présence du tabac était curieuse dans ce groupe de 10 000 points de vente, qui portent quatre enseignes différentes et dont une bonne partie de l’offre concerne des produits pour la santé, avec une activité "pharmacie" relativement importante (voir par exemple la pharmacie en ligne cvs.com). Mais certains de ces points de vente sont davantage des magasins de proximité, des "drugstores" à l’américaine, situés au coin de la rue ou dans des stations-services… Une chose est sûre : pour CVS, dans un contexte où les cigarettes représentaient historiquement un chiffre d’affaires important (estimé à 2 milliards de dollars par an), le choix d’arrêter la vente de tabac est une décision stratégique qui va dans le sens d’un recentrage sur une offre plus saine. Alors que ses concurrents comme Walgreens connaissent des difficultés qui les amènent à fermer des magasins, CVS multiplie les nouveaux services en ce sens : l’enseigne a par exemple lancé MinuteClinique, un comptoir/laboratoire d’analyse express dans ses magasins, mais aussi un Digital Innovation Lab sensé produire des applications et des objets connectés pour la santé. Elle a également développé le rayon alimentation dans ses linéaires, avec une offre nouvelle de fruits et légumes biologiques, et devrait introduire bientôt une nouvelle offre de services liés à l’optique et l’audition.
Et compte-tenu de la taille et de l’omniprésence du groupe, les impacts de sa décision d’arrêter le tabac se mesurent, non pas juste sur son chiffre d’affaires mais sur la santé globale des Américains : selon une étude publiée par l’enseigne récemment, la limitation de la vente de cigarettes est un facteur notoire d’arrêt du tabagisme (car les cigarettes restent pour beaucoup un achat d’impulsion) et, en l’espèce, cette décision de CVS aurait conduit globalement les fumeurs à acheter 95 millions de paquets de cigarettes en moins dans 13 Etats différents outre-Atlantique, en huit mois seulement sur 2015. Ce qui représente 1% de ventes en moins sur le marché du tabac et 5 paquets en moyenne par fumeur. Mais comme évoqué, CVS ne s’est pas contenté d’arrêter la vente de cigarettes : pour accompagner ses clients dans la désintoxication qu’elle a choisi d’appliquer à son offre, l’entreprise a lancé un programme global pour encourager et accompagner les fumeurs à arrêter de fumer - avec des conseils de ses pharmaciens, des produits de substitut à la nicotine de type "patch", une ligne de produits dédiée et des ressources en ligne gratuites. L’étude CVS a d’ailleurs montré une augmentation des ventes de "patches" à la nicotine de 4% dans les 13 Etats où l’enseigne est présente, dans les semaines qui ont suivi l’arrêt des ventes de tabac - ce qui atteste de l’effet positif de sa décision sur ses clients, affirme le groupe, qui a également financé un programme en ligne de sensibilisation des écoliers aux méfaits du tabac en partenariat avec l’éditeur Scholastic. Aux dernières nouvelles, l’enseigne réfléchirait également à un programme d’action sur un autre achat d’impulsion : la junk food vendue près des caisses… que CVS voudrait remplacer par des alternatives plus saines comme des yaourts, des fruits frais, etc.