Préférence pour les produits durables et réparables, consommation de services plutôt que de produits, attrait des circuits courts, regain de popularité pour le "fait-maison" et les produits d’occasion : la crise fait émerger de nouveaux comportements de consommation qui ne vont pas nécessairement à l’encontre des questions de développement durable… Parmi les marchés qui se trouvent stimulés par la récession actuelle, on trouve notamment tout ce qui a trait au textile "vintage", aux vêtements d’occasion ou de seconde main, dans un contexte où depuis 2006 une taxe dite "Emmaüs" (moins d'un centime d'euro par vêtement) doit être payée par les marques de produits de textile d'habillement, cuir, chaussures et linge de maison, ainsi sensibilisées à la nécessité de récupération, recyclage et traitement des vêtements d’occasion. Certaines marques n’ont pas attendu l’obligation légale ni la crise pour se lancer dans la récupération des vêtements : ainsi le leader de l’outdoor Patagonia a-t-il lancé dès 2006 son programme de recyclage de ses vêtements (sous-vêtements, polaires, vestes techniques, tee-shirts en coton, etc.)… et de ceux de ses concurrents, proposant du coup un nombre croissant de modèles en fibres recyclées. Avec la crise, néanmoins, l’approche gagne en popularité : ainsi, les boutiques de vêtements "vintage" font un tabac à Londres ; la marque de prêt-à-porter française APC a de son côté initié une opération originale intitulée Butler Worn Out consistant à reprendre un jean usé de sa marque contre une remise de 50% sur un jean neuf (les modèles usés et récupérés sont retraités avec du savon de Marseille et du sel, puis customisés et revendus dans le magasin ornés des initiales de leur premier porteur en gage de "traçabilité" de l’histoire du vêtement) ; dans le même esprit, le site Re-shirt propose aux internautes d’acheter des tee-shirts d’occasion vendus par leurs semblables, avec leur histoire complète. On n’y chine pas que des bouts de tissus, mais aussi des bouts de vie - et au passage, c’est autant de pesticides dans les champs de coton, de litres d’eau pour l’irrigation, des CO2 liés à l’incinération des vêtements d’économisés ! Enfin, l'enseigne Marks & Spencer propose depuis 2008 à ses clients anglais de ramener leurs vêtements (dont au moins une pièce venant de chez Marks & Spencer) à Oxfam : cette ONG de solidarité se charge, comme Emmaüs en France, de récupérer les vêtements d’occasion et de les revendre dans ses boutiques. L'originalité est que les clients Marks & Spencer se voient remettre par Oxfam, en échange de leur don de vêtements, un coupon incitatif de 5 £ valable sur tout type d’achat à partir de 35 £ effectué dans le mois chez Marks & Spencer. Une initiative intelligente, quand on sait que 46% des vêtements des Britanniques "dorment" dans des armoires dont ils ne sont pas sortis depuis plus d’un an : sur les six premiers mois, cette opération a évité la mise en décharge de 1000 tonnes de vêtements, générant des revenus supplémentaires d’un million de livres pour Oxfam.