Auréolé du prix du "meilleur café du monde" décerné en 2009 à son fondateur Gwylim Davies, le Prufrock Coffee, à l'est de Londres, propose depuis la même année à ses clients une "Disloyalty Card" les incitant à aller prendre un café dans les huit autres cafés-bars "amis" du quartier et à y faire tamponner ladite carte. Une fois que le client a essayé les huit établissements indépendants en question, il peut alors revenir au Prufrock Coffee où il se verra offrir un de ses fameux cafés... ou toute autre boisson de son choix. Une manière iconoclaste d'exercer le goût de ses clients qui a déjà fait des émules : en avril dernier, sur le même principe, s'est créée au Canada la "Toronto Coffee Conspiracy" entre sept cafés-bars indépendants et amis (le point de différence avec l'initiative londonienne étant que, cette fois, les clients peuvent choisir l'établissement dans lequel ils entament leur "tour" et où ils reviendront une fois leur carte remplie,naturellement). Une façon amusante et originale de cultiver tout à la fois la consommation de café de qualité et l'esprit communautaire, en incitant le client à être infidèle à l'enseigne mais en le récompensant pour sa fidélité au produit, à une approche du commerce privilégiant l'indépendance, et au quartier. Inattendue dans son intention et sans doute pas toujours facile à dupliquer dans le contexte de crise actuel (tous les commerces ne seront sans doute pas prêts à adresser leurs clients à leurs concurrents, a fortiori sur des produits qu'eux-mêmes proposent), la carte de "déloyauté" imaginée par le Prufrock Coffee vient en tout cas renouveler de manière innovante le concept de la carte de fidélité. Ici, l'objectif affiché n'est plus d'inciter ses clients à fréquenter régulièrement tel commerce, mais de leur donner l'habitude d'aller boire un bon café, fut-ce dans les établissements concurrents du quartier. Une manière de sortir des habituelles querelles concurrentielles, d'installer l'idée que chacun peut en réalité tirer profit d'une plus grande affluence globale et de rappeler que défendre son métier, c'est défendre la qualité du ou des produit(s) qui en font la renommée. L'idée, pour le commerce indépendant, qu'il peut sans doute lutter plus efficacement contre les grandes enseignes en se regroupant, et en se montrant plus créatif, pourrait bien faire son chemin…