Et s’il s’avérait que les fruits et légumes que nous mettons un point d’honneur à manger pour leurs qualités nutritionnelles … n’étaient en fait pas aussi nutritifs que cela, comparés à ce qu’ils étaient il y a plusieurs décennies ?
Plusieurs études récentes d’universités canadiennes, américaines et britanniques, résumées dans l’étude « Still no free lunch » de Brian Halweil, chercheur au Worldwatch Institute, ont mis en lumière la chute de la concentration en nutriments dans nos aliments. Manger toujours plus pour se nourrir moins ? C’est en tout cas ce que démontrent ces travaux qui alertent sur le phénomène de la « calorie vide » dans les fruits, légumes et céréales, beaucoup moins riches en nutriments essentiels que leurs homologues d’il y a un siècle. Les faits sont pour le moins parlants : pour obtenir l’apport en vitamine C d’une pomme des années 1950, il faudrait aujourd’hui en ingurgiter une centaine. Idem pour la vitamine A, essentielle pour nos défenses immunitaires : alors qu’une seule orange pouvait couvrir nos apports journaliers recommandés il y a un demi-siècle, il serait nécessaire d’en manger 21 aujourd’hui pour couvrir nos besoins quotidiens en vitamine A. De même, une pêche des années 1950 équivaudrait à 26 pêches aujourd’hui. Quant au calcium, le rapport est de 1 à 4 à cause des apports qui dégringolent à travers nos variétés de brocoli aujourd’hui. Et cela se vérifie également pour la viande, deux fois moins riche en fer qu'autrefois, du fait de l’appauvrissement nutritif des céréales (blé, maïs et soja) servant à alimenter les animaux.
Les causes de cette dégringolade sont multiples. Tout d’abord, l’agriculture intensive et l’augmentation des rendements agricoles ont appauvri les sols. De même, la standardisation des industries semencières aurait peu à peu mené au fil des décennies à une chute du nombre de variétés comestibles. En à peine un siècle, 75% d’entre elles ont tout simplement disparu ! En parallèle, la sélection génétique a produit des variétés de fruits ou légumes beaux et résistants aux maladies, mais beaucoup moins nutritifs.
Face à ce constat, le collectif d’associations françaises du mouvement « Graines de vie » alerte : « faudra-t-il manger 100 fruits par jour pour compenser le déficit nutritionnel des aliments issus de l’industrie agro-alimentaire ? ». Qu’en est-il en effet des fameux « cinq fruits et légumes » que le Plan National Nutrition Santé (PPNS) recommande de manger chaque jour si ceux-ci ont perdu toutes leurs qualités nutritionnelles ? « Graines de vie » appelle l’Etat à prendre en compte cet aspect et à réactualiser les tables nutritionnelles sur lesquelles se basent les recommandations du Plan.
Et dans tout ça, quid de l’agriculture biologique ? Brian Halweil, dans son étude « Still no free lunch » affirme la capacité du bio à inverser la tendance. Les aliments produits en bio seraient en effet plus riches en vitamines, en fer, magnésium et phosphore … à condition que les agriculteurs bio résistent aux sirènes de la course aux rendements et que les produits ne soient pas cueillis avant maturité !
Retrouvez l’étude « Still no free lunch » de Brian Halweil ici.